Il naquit tout en haut des tours dorées, dans le palais du père de toute chose et plus particulièrement du sien. Perché dans les bras tannés de sa mère guerrière, il était entouré de lumière dont ses souvenirs s’abreuvaient, faisant une fresque illuminée de son passé. Dans ses premières années tous autour de lui était baigné dans l’or et dans les blondeurs chatoyantes de l’architecture, on l’encourageait à se nourrir de la chaleur qui l’environnait. On l’incitait à laisser libre court à un tempérament impétueux et orageux, à être plus guerrier qu’il ne le devrait et ne pas se laisser mettre au pas, si ce n’était par son roi.

Au milieu des décors flavescents et des silhouettes drapées qui déambulaient aux milieux des piliers, il y avait une pointe d’émeraude insolente qui se glissait dans chaque recoin. Son petit frère était ombrageux, tellement discret que parfois le jeune Thor l’oubliait derrière ses envies et son existence envahissante. Mais Loki savait se rappeler à lui, pointu et acéré comme une lame de poignard. Pour le premier-né, il semblait qu’il n’avait jamais vécu sans sa présence. Ils se retrouvaient à partager leurs éducations à la royauté, pourtant si différents. Thor était impossible à mettre en laisse, inconscient et sauvage, désobéissant frontalement et s’écrasant face à la colère paternelle juste le temps qu’elle passe. Son frère semblait plus subtile que cela, ingénieux et fourbe, feignant d’accepter les règles pour mieux les contourner. Ils étaient à eux deux l’Alpha et l’Oméga, la paix et la guerre. La compétition n’aurait pas pu être naturel car « tous deux seraient élevés comme des rois, mais un seul serait destiné à régner. » Ils cherchaient chacun à tirer la couverture à eux, en bien ou en mal.  Quand la main d’un des frères se glissait dans celle du père, celle de l’autre ne perdait pas un instant pour attraper la seconde. A partir de quand le farceur se résigna ? Son frère doré n’aurait pu le dire, car il grandi en étant aveuglé par son propre reflet dans les dorures du palais.

Quand il n’était pas en train de se faire admirer dans sa tour d’ivoire par les serviteurs, la noblesse et les citoyens de passages, Thor passait son temps à élaborer des plans avec son jeune frère. Les siens tenaient le plus souvent à user de la pâleur maladive de son comparse pour feinter une urgence médicale et ainsi débloquer des passages jusqu’à lors lourdement gardé. Ils avaient déjà sévis dans toutes les salles de leur palais ensoleillé mais le premier fils d’Odin savait se faire pardonner des importunés par ses sourires et ses excuses. Bientôt, il n’eut plus à chasser l’approbation qui venait à lui naturellement. Devant lui se trouvait un escalier doré qui l’emmenait vers ce qu’on aspirait de lui. L’enfant d’or laissait sans peine ses aspirations enfantines de Valkyrie se fondre dans d’anciennes rêveries fantasques, prenant une assurance toujours plus féroce à chaque marche  franchie. Dans sa jeune paume, le poids de ses armes lui donnait de l’importance. Ses pas s’imprimait dans ce qu’il espérait être ceux d’Odin et de son attention. Il s’éloignait naturellement des arts magiques, peu envieux de faire la démonstration de son incompétence dans ces domaines peu considérés alors qu’il possédait un grand potentiel pour mener bataille. Son esprit échaudé voulait pourfendre l’ennemi pour défendre le royaume, sans approche détournée, car tel était son rôle. Celui dans lequel il se moulait en opposition à ceux des autres. Son premier centenaire fut resplendissant, plein de gratification, d’encouragements. Le ciel était clair, seulement parfois brisé par ses colères tempétueuses, aussi violentes que rapides. Thor était accoutumé à parler plus fort que tous et à faire respecter son avis d’une façon impitoyable.  Mais rien de néfaste, car il avait bon fond, arguait-on.

Les cycles suivant, il s’employa à créer sa légende au travers des armes et des batailles. Goûtant à l’adrénaline de la rage guerrière qui guidait ses muscles maintenant épais à saigner les ennemis d’Asgard. Et c’est au côté de son frère taquin qu’il menait les plus grandes batailles. Si leurs lames ne se ressemblaient en rien, l’une fine et rusée alors que l’autre était incisive et guerrière, elles faisaient raisonner les cors de la victoires à leurs retours et les tavernes étaient le lieu où Thor buvait en l’honneur de ces épiques récits. Ses louanges étaient chantés par ses compagnons de fortunes et par la liesse de son public. Sa réputation était ainsi en construction, sur les fondations de la fierté démesuré de Thor qui enviait recevoir celle de son père. Mais jamais tout en haut des marches d’or, ne fut prononcé un mot de cet ordre, alors le garçon foudroyant s’attacha à y mettre plus de conviction.  Thor voulait être le guerrier qui serait reconnu comme et par Odin. Ce faisant, il se démarquait de son frère. S’écartait avec une obstination semblable au dédain. Il embrassait l’image du chef de guerre, apprécié et idolâtré dans les contrés ambrées et dénigrait celle des arts plus obscures et déprisés de la magie. Si Loki était toujours de ses batailles, lui-même évitait les lieux de savoirs où il aurait pu rencontrer le serpent malin pour s’affairer sur les terrains d’entraînements. Il rencontra dans ses périples des compagnons de grandes valeurs qu’on retiendrait comme Hogun, un Vanir combattant au cœur loyal, Fandral, un Asgardien charmeur et fin épéiste et Volstagg, un guerrier savant fêter les batailles avec appétit. A eux trois ils formaient le trio palatin. Et pour les accompagner, ils pouvaient compter Dame Sif, une combattante farouche qui gagna le vieux cœur rétif de la foule par ses victoires éclatantes. Leurs réputations n’étaient plus à refaire, ils étaient à eux cinq les plus valeureux guerriers du Royaume, sur tout les front.

Le duo princier partait parfois seul dans des opérations rusées, d’autres fois le malicieux suivaient son frère et ses compagnons, mais Thor était si souvent sur les champs de batailles que leurs chemins se séparaient bien souvent. Les temps paraissaient interminable passé entre les murs froids du palais éternel et la rage du combat coulait comme l’hydromel dans son sang. Réchauffant son cœur et son esprit dans une soif d’occire et d’arracher le triomphe des entrailles de ses ennemis. Si ses premières guerres lui avaient laissés une appréhension de l’inconnu que son frère apaisa, elles furent vite rincer dans l’ivresse de la réussite, le vin coulant abondamment pour ses exploits. Très vite, il avait cessé de craindre la chute et ne poursuivait que l’ascension, se sentant invincible. Guidé par le besoin de prouver à son père qu’il était un homme méritant de protéger l’honneur et la cité d’Asgard.

Quand il reçu Mjolnir de la main du père de toute chose,  il n’en fut pas arrogant. Mais réellement pourri d’orgueil. Le garçon d’or recevait les privilèges comme des dus, la récompense de son esprit guerrier et de ses faits d’armes. Sans qu’aucune de ses actions n’est de réelles conséquence. Ses fautes quand ils revenaient avec pertes et fracas ? Minimes. Les mésaventures étaient du fait de ceux qui allait contre sa volonté légitime ou de circonstances exceptionnelles hors de son contrôle. Thor avait, dans sa glorieuse adolescence, cette insouciance et inconscience de celui qui n’avait jamais dégringolé sur un terrain sans filet. Il était une étoile filante, volant bien au-dessus de toutes formes de vie, détruisant sur son passage les débris qui se trouvait dans son sillage et les rares astres qui parvenaient à se mettre en orbite autour de lui finiraient tôt ou tard brûlés dans sa course. Cette offrande était faite à celui qui avait maîtrisé les arcanes de la destruction sans jamais s’initier à celles de la création. Elle remplie le prince foudroyant d’un sentiment de pouvoir divin. Et dans les années qui suivirent il fut connu comme le défaiseur d’armée, terrassant sous le fer noble du marteau légendaire des hordes d’ennemis. On chantait ses louanges en chœur, on cherchait sa présence dans les tavernes, espérant cueillir les récits épiques de sa bouche. Souvent il en profitait, participant aux joutes verbales initié par le bon Fandral. Il riait avec son frère de ses ruses et de ses subterfuges qui pouvaient avoir l’air d’un regard extérieur de preuves de lâchetés mais sauvait leurs vies sur le terrain. Cependant sa langue n’était que dicté par la taquinerie et les demande de la foule envieuse, alors il participait en riant même quand il trouvait les remarques loin de la réalité du moment. Ils savaient tous ce qu’ils valaient au fond d’eux même. Fort de ses nouveaux pouvoir, Thor fit des escapades sur la terre des Midgardiens qu’il avait déjà eu l’occasion de voir en étant enfant avec son père. Accompagné des preux guerriers et de son frère, il impressionna bien vite les populations locales qui vendirent leurs croyances contre quelques éclairs et une pluie bienfaisante pour les cultures. Peur tacite et reconnaissance. Là où il passait, il défaisait ou subjuguait.

Dans le domaine, son sourire réglait tous les problèmes, même quand il était factice. A Asgard tout était question d’honneur, la peine était une entreprise privée et solitaire. Son père, dans sa grande sagesse, lui apprit très tôt de ne pas laisser les doutes contrarier ses avancés, lui intima de savoir faire semblant de s’amuser aux grands banquets qui lui étaient offert et dédié pour saisir le bon de l’avenir. Et le prince de l’éternel suivait ses préceptes sans faillir. Il n’y avait que dans l’antre du serpent qu’il tombait les masques pour confier ses incertitudes, mais plus le spectre du trône se rapprochait d’eux et plus il les taisaient. Car un roi n’était pas en proie aux questionnements, il agissait sans hésitation. Un souverain ne craignait rien si ce n’était sa propre faiblesse. Un monarque ne laissait pas le temps à l’ennemi de le mettre à genoux et coupait la tête des dangers avant leurs concrétisations. Comme son père l’avait fait en attaquant le peuple Jotun jusque dans ses terres les plus glacées. Comme l’avait fait le père de son père, jadis, en défaisant les Svartálfars jusque dans leur propre monde. Thor accueillait encore les mots de réconforts du sorcier malin avec félicité et écoutait d’une oreille attentive ses conseils avisés. Mais son cœur lui disait de ne pas laisser sa faiblesse l’enchaîner aux décisions d’autrui et de rester maître des situations en reléguant son frère et ses amis à la seconde place, spectateurs de son bon vouloir. Et cela paya, car son père annonça finalement son couronnement. Celui qui le rendrait enfin fier de son héritage.

L’annonce fit l’effet d’un raz-de-marée dans le royaume, les festivités étaient déjà anticipées et le sujet ne quittait plus les lèvres des habitants. Si il avait été évident pour beaucoup que son ascension au trône ne ferait aucun doute, la date de son devenir avait su tenir en haleine les Ases. Ses nuits étaient courtes, ses passages dans les tavernes fréquents et, à sa honte, ses ruminations occupaient les silences de sa solitude. Parfois, il se voyait dans les reflets dorées des piliers du palais et se demandait ce que les autres voyaient de lui. Son visage ressortissait lisse et imprimé dans les murs des lieux. Son corps se détournait doucement alors et il allait s’abreuver de la joie communicative de ses amis.

Le jour où il finirait de gravir toutes les marches pour se tenir enfin au côté de son père arriva plus vite qu’il ne l’eut anticiper, anesthésié par la liesse générale et les repas fastueux fêtant la nouvelle.  Son ventre était serré et refusait toutes formes de vivres si ce n’était le vin qui coulait dans sa gorge pour lui donner le courage d’entrer dans le hall où tout Asgard s’était rassemblé pour le voir atterrir après son envol si long. Comme à son habitude, son frère avait, ce jour là, fait preuve d’un sens aiguë de l’observation, pointant ses faiblesses alors que le guerrier s’en défendait férocement, mais posant le baume de ses paroles apaisantes sur son esprit échauffé. Sens de l’observation que le malicieux avait hérité de leur mère,  comme sa capacité à apparaître des profondeurs de chaque pièce et de surprendre Thor dans les moments où il voulait le moins être comprit. Les mots doux des magiciens et la présence ses fiers amis à la cérémonie surent restaurer l’énergie perdu du foudroyant futur roi. Il avança en faisant le spectacle, démontrant son assurance par ses cris et sa fougue. Peu importait si le sol était flou, si les visages étaient vagues, si son coeur pulsait comme les coups du métal sur l’enclume et si son ventre se noyait dans le vin ingurgité depuis le petit matin. Les dix marches qui le séparaient du trône d’Odin, le père de toute chose, son père, lui semblèrent prendre une hauteur colossale. Il n’avait jamais pensé, lui qui vivait au dessus des nuages, dans le haut palais de l’éternel, des centaines de mètres au dessus de la cité, avoir le vertige pour ce si petit escalier. Quand il s’agenouilla, il accrocha son regard à sa famille, leurs faisant des appels insolents pour conjurer le mauvais sort avant de jeter son regard asséché dans celui du roi d’Asgard. Promettant. A chaque promesse, il y avait un nouveau doute, balayé aussi rapidement que le précédent. Il était prêt.

L’attaque des Jotuns interrompit la cérémonie, leurs mains sauvages essayant de s’accaparer la précieuse relique de la cassette des hivers d’antan. Cette soudaine rupture du traité de paix était aux yeux du presque roi une violation grave, et la négliger amènerait Asgard à sombrer sous la violence des géants de glaces.  Ce n’était pas de l’avis du monarque actuel, et la dispute qui suivi était un avertissement infantilisant pour celui qui, à peine quelques minutes plus tôt, avait faillit récupérer tout les pouvoirs de la fonction royale. Sa colère fut nourri par une peur très réelle ce jour là, celle haineuse qui disait qu’en abandonnant l’idée de frapper les premiers, le sang coulerait dans les rues de la cité éternelle. Son frère su apaiser ses passions et lui donner la conviction de poursuivre les idées que Thor savait noble. Les mêmes pensées que celles inscrites dans l’histoire même du palais, dans les livres qui composaient sa bibliothèque et dans les récits qui se racontait de parents à enfants. Le prince indocile savait qu’il devait se rendre dans les terres mêmes des odieux enfants d’Ymir pour les mettre à genoux Mais qu’il ne pourrait le faire sans l’aide de son plus grand allié et ami, alors il proposa à Loki, son malicieux frère, de l’accompagner. L’appréhension de son refus découpait sur son visage rouge de fureur une mine ahuri, et quand le sorcier accepta il soupira de soulagement, plus fort pour affronter cette menace. Il vint quérir également l’aide de ses amis et preux guerriers, pour les emmener jusqu’aux confins du monde, là où ils n’avaient jamais foulé le sol. La colère d’Odin serait terrible, mais sûr de son bon droit, l’héritier tempétueux en accepta le risque qu’il ignorait encore ne pas pouvoir payer,  et se mit en route vers les froides contrées de Jotunheim. Heimdall, le gardien du pont entre les neufs royaumes, accepta sa requête impérieuse, souhaitant savoir par quelle artifice les géants avaient trompés son regard à l’infini perception. Thor engagea, ses amis et lui-même, dans une quête dangereuse dont il ne reviendrait peut-être pas. Et tout ce qu’il était capable de ressentir était sa colère ponctuée d’impatience.

Thor n’avait jamais rien vu de tel que Jotunheim. Une terre abandonnée d’Asgard. S’écroulant sous le poids de son échec, l’ancienne architecture ployant sous le vent glaciale et mortifère des environs. Les terres étaient silencieuses, la neige crissait sous leurs pieds et le vent fouettait leurs peaux habitués à la lumière d’Asgard et aux climats tempérés des royaumes sous sa protection. Mais le prince du soleil ne sentait pas le froid, brûlant de fureur de voir les couards se dissimuler à lui. Les Jotuns étaient connus pour leurs magies viles des éléments de la nature et leurs stratégies sauvages basées sur l’attente et les attaques éclaires. Mais le futur roi d’Asgard avait dans l’idée de ne pas leur laisser le choix de payer leurs offenses, les yeux dans les yeux. De les mettre à genoux pour contempler leurs yeux de sauvages et pour y voir la compréhension de leurs faiblesses face à la noblesse Asgardienne. Et le roi des géants se dévoila à lui, salissant le nom d’Odin, ses sujets se dressant à ses côtés pour le défendre. Se riant de ses intentions guerrières, arguant qu’il n’était qu’un enfant, qui voulait être un homme aux yeux de son père. Le sang battait les tempes du prétendu dieu, aveuglant sa raison et lui faisant oublier toutes notions de prudence. Son frère, plus rusé, plus calculé que son aîné, réussi à le convaincre après bien des échecs que débuté une guerre n’était enviable pour aucun d’entre eux. Qu’il y avait une maigre possibilité que repartir soit la meilleur chose à faire. Devant lui, Laufey lui faisait face dans toute sa prétention. Il était un être de glace, monstre de conte de fée et assassin plein de couardise. Mais on discernait dans ses traits la fatigue de l’âge. Un roi marqué et vieillissant. Facile à défaire. Assez pleutre pour rester terré dans sa forteresse de glace terne. Dos au monstre de son enfance, il regardait le dos en-capé de Loki s’éloigner, prêt à le suivre dans un silence courroucé. Si le malicieux avait ainsi ravalé sa fierté, si vive d’habitude, peut-être était-ce là le signe que la meilleure solution était de tourner les talons. Thor, dieu du Tonnerre et meilleur guerrier d’Asgard faillit être miséricordieux, mais une insulte de trop envoya le roi des géants dans les décombres de son palais. La contre-attaque ne se fit attendre et le sourire du fils d’Odin était large tandis qu’il pourfendait les ennemis. Faisant grand nombre de pertes dans les troupes adverses. Mjolnir fracassait les crânes de glaces et émiettaient leurs corps avec puissance. La fièvre du combat le rendez ivre et bien moins attentifs. Bien moins soucieux. Quand Fandral fut blessé, c’est presque avec exaspération que le guerrier répondit aux demandes insistante de ses compagnons en leurs disant de partir sans lui. Car le blond resterait mettre ce royaume à genoux, car il n’avait pas l’envie de voir que ses amis étaient en sous-nombres, qu’il pouvait tout perdre à force de vouloir la chute de ses opposants. Non, tout ce qu’il voyait c’était que les sauvages qui s’étaient soulevé face à Asgard tombaient mort à ses pieds. Ce ne fut que quand la gueule d’un dragon féroce se dressa devant ses camarades acculés qu’il réagit pour lui arracher la vie. Fier de lui et des récits que cela amènerait une fois rentré victorieux. Mais point de victoire pour Thor et ses compagnons d’infortunes, car les géants de glaces profitaient de les trouver aux pieds du murs pour les encercler. Sans l’intervention d’Odin, leurs vies auraient sombré dans les précipices glacées du monde à l’agonie.    

Sûr de son action, Thor s’en défendit dans l’antre du Bifrost à leur retour. Brûlant d’agir. A l’entente de la guerre qui avait été déclarée, il sentait avec aigreur la situation lui échapper. Il essayait de la retenir, de la précéder, d’agir car reculer ne serait là que la perte d’un temps précieux. Il voyait déjà dans son esprit les armées déferler sur la cité à la moindre seconde d’hésitation, emportant le royaume dans la froideur de la mort. Cette peur se transformait en colère, qui se transformait elle-même en fureur. Une fureur qui guidait ses pensées, ses actes, son être qui se plissait et devenait rouge de contrariété. Quand elle retomba, ce fut le silence qui accueillit sa chute. Un moment figé où il évitait de réfléchir à ses propres mots. Son père ne cacha pas sa déception et le prince fautif n’avait plus l’énergie de continuer la bataille, démuni une fois que le carburant de la colère s’était tari. Les mots paternels l’accablaient et entrait en contradiction avec son propre sentiment. Les éclairs battaient autour d’eux, l’arbre monde ouvrant ses branches pour permettre un passage. Il ne pouvait que garder le silence, incapable de rétorquer quelconque arguments à la violence des remontrances. Il ne trouvait là ni défense ni attaque. Il n’arrivait pourtant pas à se défaire de l’idée qu’il n’avait agit que pour le mieux. Ses lèvres restaient closes, ne sachant que dire pour faire valoir ce sentiment purement viscéral. Quand son père lui arracha ses harnachements en même temps que ses titres, Thor releva vers lui des yeux immatures. Yeux où il n’y avait nul colère, juste une peur très enfantine devant la grande fureur parentale. Le banissement qui suivit l’éloigna du soleil où il avait voulu voler pour rejoindre le sable aride des terres de Midgard.

Sans pouvoir et sans but, il hurlait vers le ciel pour que son père l’entende, ignorant les humains qui l’avaient percutés de leurs engin métallique rudimentaire. Car ses pensées étaient toutes tournées vers le fait de s’expliquer, de se racheter. De regagner ce qu’il avait perdu aussi vite que possible. Ses pouvoirs, sa place, ses proches, tout perdu pour quelques mots prononcés sous le coup de la colère. Son agitation dictée par sa frayeur déstructurée fut interrompu par le courant électrique qui passa dans son corps. Il s’effondra sous l’effet de l’armement inconnu, ce « taser. » Pour ne se réveiller que bien plus tard, entouré d’inconnus qu’il attaqua. Confus et révolté, hurlant son titre et s’échinant à faire respecter sa parole. Mais sa voix avait peu de poids dans ce monde et la violence ne lui donna pas victoire. Le prince déchu dût attendre d’être seul pour s’extraire de ses sangles et s’enfuir. Après quelques rencontres douloureuses avec les moyens de locomotion locaux, Thor se retrouva à faire équipe avec les humains rencontrés plus tôt. Les astrophysiciens Jane Foster et Erik Selvig et leur assistante au sang chaud, Darcy Lewis.  Il était évident qu’ils le prenaient pour un fou, mais ils lui apprirent quelques coutumes locales. Briser étaient par exemple inadéquat. Il y avait dans leurs façons d’être une douceur qu’on associait plus aux guérisseuses qu’aux guerriers dans les contrées d’Asgard. Et le fils d’Odin s’en accommodat sans question, mais pour autant ne s’y intéressa pas outre mesure, l’esprit toujours haut, tout tourné vers la cité éternelle et sa rédemption. La vie des locaux et leurs manières d’êtres étaient son dernier soucis. La scientifique et lui avait un accord, si il récupérait ses travaux au passage, elle le mènerait à la base du SHIELD pour qu’il y récupère Mjolnir. Ils discutaient sur les routes désertiques du Nouveau-Mexique et Thor s’émerveillait de la détermination de l’humaine, si loin de celle guerrière de ses camarades. Une obstination qui ne se couplait pas au besoin de succès et de reconnaissance.

Pénétrer le lieu sécurisé fut aisé, presque autant que maîtriser les agents qui lui barraient la route, celle qui le mènerait vers sa vie antérieur. Il se sentait déjà à Asgard quand sa paume s’enroula autour du manche du marteau légendaire. Peut-être était-ce pourquoi la chute fut si douloureuse quand il se rendit compte qu’il n’y avait pas de solution. Le métal noble ne se soulevant pas sous son appel car il n’en était pas digne. Les mots d’Odin lui revinrent et s’imprimèrent dans son esprit en feu. Il n’y avait plus d’espoir ; sans pouvoir et perdu sur ses terres, il ne pourrait jamais prouver sa force et son honneur. Alors à quoi bon ? Il rendit les armes et se laissa attraper. Son silence face à l’interrogatoire était lourd. Thor se remettait tout juste de son atterrissage brutal dans la réalité et n’était pas décidé à rendre le spectacle intéressant pour ces auto-proclamés gardiens. Quand plus tard son frère apparu dans sa cellule, son enthousiasme se réveilla. L’ancien prince fut sincèrement heureux de le voir, plus modeste qu’il ne l’était d’habitude dans ses envies. Juste prêt à apprécier sa venue sur terre, juste prêt à apprécier son apparition et le réconfort et sa présence. Sans en demander plus. Et le ton grave de son frère l’inquiéta, l’inquiétude amena sa hâte d’agir et sa hâte d’agir l’amena à quémander son retour. Toujours envieux de poursuivre sur la même ligne directrice, de suivre le même chemin linéaire, de ne jamais reculer. Mais il n’y avait plus de chemin possible à l’annonce de la mort de son père. Tout l’accablait de ce décès, Thor ne pouvait se mentir, tout était sa faute. La faute de son bannissement, de ses mots cruels et de son périple inconscient. Son frère avait succédé à leur père pour offrir un avenir aux habitants d’Asgard tandis que leur prince avait trahi leur confiance. Quand il demanda d’une voix timide si son retour était possible, son énergie guerrière l’avait quitté, il n’avait que l’envie de voir et toucher le visage de sa mère. De pouvoir entendre la voix de ses amis. De pouvoir profiter de la présence apaisante de son frère plus longtemps. Mais la trêve avec Jotunheim était assujetti à son exil, Loki ne pouvait pas trahir la mémoire de leur père ainsi et surtout sa mère n’était pas prête à le revoir. Évidemment… Thor pouvait l’imaginer. Elle n’était pas prête à revoir son fils qui avait rompu les devoirs qu’il avait envers les siens, précipitant la mort de leur roi et fragilisant la paix entre les royaumes. Pas prête de le voir revenir alors que son choix égoïste avaient failli les condamner une fois et que son retour finirait d’embraser la cité. Tout était fini et jamais il ne pourrait réparer le mal qu’il avait fait par son obstination. Il devait laisser les événements entre des mains plus avisées, accepter le départ de son frère avec la consolation de savoir le royaume éternel sous la protection d’un roi moins destructeur qu’il aurait pu être. Ils se dirent adieu. C’était des adieux. Son frère retournerait sur le trône pour le protéger et lui mourrait très vite, en moins d’un siècle. Un battement de cil pour les Ases.  

Erik Selvig vint le sauver de sa prison physique en prétendant qu’il était un docteur quelconque travaillant avec lui. Thor le suivit sans idée de ce que la nuit apporterait, rien probablement. Ils burent et discutèrent. Il parla de sa confusion à ne pas savoir quoi faire à présent. Lui qui avait toujours eu une existence toute tracée. On l’avait éduqué pour ce qu’il allait devenir, les attentes sur lui étaient si clairs et jamais il n’avait cherché de but, en possédant un qu’un royaume entier lui offrait.  Toute personne qui cherche sa place dans l’existence, doit admettre qu’il n’a aucune idée de ce qu’il y fait, lui dit le bon docteur avec une sagesse qui surprit l’ancien Ase. Les humains étaient sûrement bien plus avisés que lui. Leurs vies étaient si courtes et pourtant si importante, là où le blond aurait pu paniqué de voir tout finir si tôt, ils donnaient un sens à leur vie en le créant. Cette pensée apaisa le prince déchu. Il avait tenu toute sa vie à suivre un seul chemin et à ne jamais faire un pas de recule. Il avait déconsidéré le nombre de chemins parallèles possibles, ceux où il aurait pu faire mieux. Aujourd’hui peut-être était-il temps de faire une croix sur celui de la destruction lancé par un enfant aveuglé. L’idée de ce deuil écharpait son cœur, autant que penser à ceux qu’il avait perdu dans sa folie guerrière. Mais pour la première fois il semblait que ses pieds touchaient sol, la colère s’était apaisé et les regrets se mêlaient au soulagement de ne plus tenir autant de vie qu’il brisait entre ses mains.  

Les nuits suivantes il parla à Jane de son existence, lui présentant en parole sa famille avec une grande affection. Il expliqua ce qu’était le monde pour lui, le raccrochant à celui de la scientifique et aimant la façon dont ils se complétaient. Leurs rapprochements avaient le goût de la quiétude, l’ancien roi goûtant à la charité et à la reconnaissance qui rythmait la vie humaine et qui était désapprouvé dans les élites de la cité d’or. Il s’accommodait plus que bien à la banalité de la civilité, même si parfois il brûlait d’envie d’agir pour aider son pays qui était très loin de lui. Thor appréciait aider, à la cuisine, à la vie quotidienne, aux travaux, des choses pour lesquels un guerrier n’avait ni intérêt ni temps à déployer. Car il aimait juste essayer de rendre des vies plus simples et sans ses pouvoirs, il s’exécutait à son niveau et à celui de Jane. Le manque de responsabilité lui donnait un teint bien meilleur, son anxiété apaisée, il ne s’enrageait plus d’impuissance. Il avançait en s’accrochant à la présence de ses nouveaux amis et à la pensée que plus haut son frère menait pour lui le pays. Même si il pleurait la perte de Loki et de sa mère, qu’il regrettait la présence de ses amis, il tenait en les sachant vivant et loin de son règne qui aurait détruit Asgard. Thor était maintenant un tout petit humain dans un tout petit royaume, au centre de tout les autres. Au centre du monde et si insignifiant.  

Le trio palatin et dame Sif firent leurs arrivés dans ces terres souvent visitées au cours des siècles mais rarement comprises. Leur venue fut accueillit par des effusions de joies, Thor accueillant purement et sincèrement leurs présences et l’opportunité de leur faire ses adieux. Comment pouvait-on mettre plus bas que terre quelqu’un qui avait déjà chuté tout en bas et s’y était finalement retrouvé ? La réponse était évidente ; on lui faisait tomber le ciel sur la tête. Quand le mensonge de Loki se dévoila à lui et que la mort du père qu’il avait pleuré fut démystifié, il lui sembla sentir tout le poids d’Asgard s’écrouler sur lui. Son frère était farceur. Son frère était malicieux. Son frère était menteur. Revanchard, oui. Cruel, parfois. Féroce, certainement. Jamais gratuitement, aussi tordu soit ses raisonnements. Il venait pourtant de condamner Thor à mort, perdu sur les terres de Midgard loin de sa famille et de ses amis. Alors une seule question tournait en boucle dans l’esprit blessé de l’ancien dieu, quelle offense justifiait ce désaveux ? Si total et direct, Loki jugeant qu’une conversation n’aurait pu soigner les maux qu’il lui avait infligé. Le blond n’avait toujours su diagnostique la souffrance du malicieux qu’à la puissance de ses contre-attaques. Il n’eut pas le temps de s’attarder sur la question car bientôt le destructeur, parcourait les rues du villages humains pour le trouver, se moquant bien des dégâts qu’il ferait sur son passage. Sans pouvoir, il ne pouvait agir… A moins que. Il y avait tellement de chemin possible, les racines étaient nombreuses. Les guerriers feraient ce qu’il ne pourrait pas en détournant l’attention du géant de métal pendant qu’il ferait fuir les habitants avec l’aide de la chère Jane. Il laisserait sa place de héros pour offrir son soutient dans cette entreprise. Pour la première fois de sa vie, il allait préserver sans verser le sang. La ville fut rapidement déserte mais l’ancien gardien d’Asgard était inébranlable, prêt à briser chaque vie qui s’opposerait à son dessein. Et quand les guerriers seraient tombés et que lui aussi, personne ne pourrait plus empêcher son frère de régner, fou d’une douleur que Thor n’arrivait à saisir. Le prince d’Asgard utilisa des mots plutôt que des ordres pour convaincre ses amis de partir et de se préserver pour s’interposer entre Loki et ses noirs desseins. Il usa de l’empathie plutôt que de son incompréhension, suppliant son frère de ne prendre d’autres vies que la sienne et d’accepter ses excuses pour les tords qu’il lui avait fait. Il fut projeté par la puissance du titan de métal qui n’avait pas besoin de plus pour le faire s’éteindre. L’enfant d’or avait toujours était un brasier inconstant, s’embrasant d’une fureur aussi violente qu’éphémère. Et un jour serait venue le temps où une bourrasque de vent trop puissante l’aurait envoyé se dispersé et que son existence aurait prit fin. Mais aujourd’hui, il n’était plus ce feu-de-joie qui se consumait lui-même pour exister et le foyer humble des flammes qui l’animaient étaient fort, stable et contrôlé. Et quand il menaça de s’éteindre, c’est la foudre puissante de Mjolnir qui le réveilla, le marteau légendaire fendant l’air pour rejoindre sa main. L’éclair qui le traversa lui rendit ses pouvoirs, les faisant irradier. Bien peu de temps après, le golem d’acier avait ployé sous ses coups et il se préparait à affronter son frère. A affronter ce qu’il avait lui-même provoquer. Il abandonna Jane pour protéger son royaume.

Arrivé à Asgard, il ne put s’empêcher d’être plein d’une colère froide devant la folie qui se jouait sous les machinations du magicien. L’idée que son meilleur ami, que son allié le plus cher, soit en train de mentir à tous était plus amer qu’il n’aurait pu l’imaginer. Il ne profita que peu de l’étreinte de sa mère à son retour, trop concentré sur le visage innocent de Loki, l’acculant face à ses méfaits. Mais tout était déjà trop tard, son frère avait lancé l’engrenage de la destruction, cherchant à détruire la terre de glace que Thor lui même avait voulu assiégé dans sa cruauté immature. La carcasse du roi de Jotunheim était déjà au pied du prince sombre, mais rien ne semblait raisonner l’esprit désarticulé de son frère. La folie du magicien se condensait dans ses plans pour détruire la race des géants du froids. Il usa du sceptre de leur père pour faire ployer le Bifrost à sa volonté. Toutes les énergies qui liaient les neufs royaumes et formaient l’arbre monde se déréglaient et s’abattaient sur les terres glacées de Jotunheim. La dévastation suivrait la lumière éblouissante du rayon.  Ils se retrouvèrent sur le pont aux nuances bigarrés, lieu qui avait tant accueillit leurs allés et venus quand  les jeunes princes s’aventuraient dans les contrées éloignées des neufs royaumes. Face au visage défait de son frère prit d’une fièvre dont Thor ignorait totalement la nature, le guerrier regrettait avoir cru être un jour prêt à gouverner. Lui, si démuni et incapable de porter des coups sur un visage qui se superposait à des doux et parfois acides souvenirs. Il était loin, l’enfant qui voulait être un roi, il n’y avait sur ce pont que deux âmes trop jeunes face à des tumultes qui les dépassaient. Dans leurs cris et leurs combat désespérés suintaient toutes les émotions à vifs qui les possédaient et leur enlevaient tout contrôle de la situation. Thor ne voulait perdre personne, et c’est avec cette pensée absolument dévorante qu’il assena le premier coup de marteau sur le pont du Bifrost. Son frère lui hurlait que c’était un acte de pure folie, et le guerrier aurait été d’accord avec lui auparavant. Car priver Asgard du Bifrost, c’était empêcher les troupes de la cité éternelle d’attaquer et d’assujettir des armées hostiles sur les autres mondes. Voilà là la pensé d’un soldat qui préférait se battre pour la paix plutôt que de la défendre. Aujourd’hui, le fils d’Odin voulait utiliser l’arme légendaire pour stopper l’insensible dévastation qu’il avait lancé et défendre des vies plutôt que des idées.

Le pont se fissurait sous ses coups condamnés, son énergie brillant dangereusement au travers des morcellements. Loki voulu l’arrêter, voulu peut-être protéger le pont aux couleurs d’arc-en-ciel, symbole d’Asgard. Voulu très certainement le laisser achever son œuvre mortel. Mais un dernier coup ouvrit le sol à leur pied. Toutes les essences mystiques de la passerelle se libérèrent dans une explosion qui les projetèrent comme des poupées de chiffons. Les flots furent balayer et le Bifrost s’écroula sous son poids, sombrant dans les ténèbres de l’espace qu’il déchira. Leurs deux corps se précipitaient vers l’obscurité tachetée de la galaxies. La main du prince de foudre se tendait vers celle de son petit frère, tremblante et étirée dans un mouvement décharné. Loin, derrière eux Asgard était debout, d’or et de vie, dans toute sa splendeur, insensible à leur chute. Sa paume agrippa le sceptre resplendissant du magicien et seule la main de son père attrapant sa cheville les empêcha d’échouer dans le vide. Suspendu, la tête vers le vide, Thor resserrait sa prise autour du manche dorée auxquelles se raccrochait le plus jeune. Où était parti l’enfant imprudent, qui ne jugeait jamais le danger que ses proches encouraient assez lourd pour stopper ses batailles sanguinaires ? Peut-être faisait-il trop frontalement face à l’horreur de la chute possible du brun. La terreur courait dans ses veines, glaçante et étourdissante. Il devait le remonter, juste le remonter. Sa seconde main continuait de se tordre pour se rapprocher du corps pendant et tourmenté. Son esprit malin imprima la seconde d’effroi qui le secoua profondément quand il comprit quelque chose d’intangible dans le regard d’émeraude face à lui. L’imprima dans son cœur pour l’avenir. Pour ses futurs nuits d’insomnies. Ce regard, quand Odin dénia à son plus jeune fils son approbation. Celui que Loki avait quand il décida de lâcher la surface poli du sceptre qu’il avait convoité pour l’entreprise vaine de rendre fier son père. La paume autour de la cheville de Thor était solide, le retenant quand il chercha à s’étirer, à se jeter plus en avant pour rattraper le corps déjà loin de son petit frère. Ses cris étaient tout ce qui pouvait encore toucher la silhouette s’enfonçant dans le tissus de l’espace déchiré par le passage du Bifrost, avant qu’elle ne disparaisse complètement. Avant que plus rien ne reste sauf le goût abominable du regret.

A Asgard, il n’y avait pas de place pour le deuil. On pleura le prince perdu une journée et tous revinrent à leur quotidien, car tel était le symbole de leurs honneurs combatifs. Mais les événements repassaient en boucle dans l’esprit du prince. La nature de son frère lui fit révéler, mais il ne pouvait s’empêcher de ressasser. Avec toujours la même question ; comment tout avait ainsi dégénéré ? Dans une telle peine, une telle douleur et une telle violence. Sûrement était-ce les graines qu’avaient semés Thor dans sa folie d’un règne impitoyable et colérique. Dans son narcissisme corrosif qui n’avait pas laissé à quiconque le droit d’exister plus que lui. L’Asgardien cherchait à éviter les lieux fréquentés, les demandes de ses amis, de sa famille, désireux de porter le poids de son chagrin seul. Il gardait la tête haute, les épaules droites et l’air égal. Les couloirs d’or froid du palais éternel lui renvoyait un reflet angoissant. Mais la fuite lui était impossible, le Bifrost brisé il ne pouvait aller trouver réconfort sur terre et auprès de la douceur permissive et inédite de Jane. Les nuits, il allait demander des nouvelles à Heimdall, le gardien qui voyait tout. Des nouvelles de ses amis terriens, de l’astrophysicienne. Leur amitié solide se construit sous le ciel étoilé et au dessus de l’espace scarifié qui avait prit la vie de son frère. Et si, le blond ne se permettait pas de montrer le poids qui pesait sur ses épaules,  sa peine était inscrite à même la peau de son armure. Les armoiries de son frère inscrite dans le cuir solide de son brassard et accompagnant les batailles à venir.

Les mois s’écoulaient dans une monotonie suffocante. Asgard était retranchée sur elle-même, vulnérable. Le palais se dévoilait dans toute sa superficialité aux yeux du prince acclamé. Thor était plus souvent dans les rues que dans les couloirs plaqué d’or si vide de malice. Ses soirées à la taverne était d’un réconfort amer, la présence de ses amis étaient un baume, mais l’humeur qu’on lui demandait ne venait pas, jamais. Sa présence était calme, tout au plus un peu amusé, mais plus dans l’exubérance conquérante qu’on lui connaissait jusqu’à lors. Heimdall était un compagnon de parole bien sage pour l’héritier au trône, lui rappelant le savoir discret de sa mère. Le gardien était  son informateur pour s’enquérir de ceux qu’il avait abandonné sur terre et pour les regretter. Mais, au fond de lui, il y avait une satisfaction égoïste à ne pouvoir retourner sur Midgard, car il n’avait nul envie de se confronter à nouveaux aux midgardiens qu’il ne pourrait contenter, le poids de la couronne pesant déjà sur ses épaules affaiblies. Les promesses de son couronnement étaient en suspension dans l’air. Tous attendait qu’il se sente prêt et tous attendait qu’il le fasse rapidement. Mais il n’y avait nul royauté en lui, c’est par ses mains qu’il avait plongé un royaume dans la désolation et qu’il avait échappé une vie lui étant précieuse. Thor ne savait protéger, pourtant son dos devait se paré d’armure et sa tête devait rester droite sous peine de décapiter leur monarchie.  

Un matin, on fit demander le prince dans la salle du trône. Les visages y étaient graves, le roi se tenant dignement sur son trône, le gardien du Bifrost à ses côtés. Le Bifrost venait d’achever sa reconstruction et le royaume éternel était prêt à se rouvrir aux autres. Mais là n’était pas la raison de sa présence, les nouvelles étaient affligeantes et Heimdall apportait un constat bien sombre. Thor aurait pensé que sous quelques contextes que ce soit, la nouvelle de la survie de son frère l’aurait enchanté. Pas dans ce cas. Si l’espoir et le soulagement était présent, il y’avait aussi en lui la colère, chaude et incisive. Colère de savoir Loki sur terre, à tuer les peuples Midgardiens et à tenter de les livrer aux armées chitauris, colère de ne pas comprendre ce qui poussait sa folie et sa course vers sa propre perte.  Son coeur était déchiré entre des émotions contradictoires et il les tut pour remplir son devoir. Sous l’étendart des forces d’Asgard, il se rendit sur terre pour arracher son frère à la juridiction humaine. Il l’extirpa des mains des gardiens locaux et de leur vaisseau, s’échouant sur un pan de roche à l’écart pour faire entendre la raison au magicien et quérir sa voix sans l’œil implacable du père de toute chose. Pour lui donner une chance de rentrer de lui-même vers leur foyer. Son visage était décharné, ses yeux brillaient d’un éclat que Thor ne lui connaissait pas, son regard était agité et son visage avait une teinte blafarde.  Leurs timbres de voix se rencontraient mais ils ne parlaient plus le même langage, le dieu du tonnerre tentait de faire appelle à des souvenirs que sa malicieuse moitié rejetait avec un implacable dénie. Loki semblait se raccrocher à ses ressentiments pour nourrir ses noirs desseins, mais son frère savait qu’il n’y avait pas que le choix du magicien qui guider ses actions. Etait-ce de la prétention que de croire le connaître, alors que le blond n’avait su déceler sa rancœur jusqu’à ce qu’elle pourrisse et emporte tout dans son sillage ? Possible, mais Thor ne pouvait voir son frère comme un tueur d’innocents. Peu attaché aux autres, il était vrai, mais pas un meurtrier froid et sanguinaire. Quelqu’un lui avait montré le vrai pouvoir selon ses propres mots. Il y avait une emprise, une emprise qui contrôlait l’auto-proclamé roi et qui, dans l’ombre, jouait avec lui pour des plans plus sombres. Qui consumerait Loki et l’emporterait en obtenant ce qu’elle voulait. Le rejet commençait à jouer dangereusement avec l’esprit colérique de Thor qui s’énervait un peu plus à chaque remarque. S’armurant pour honorer ses responsabilités. Alors quand les héros locaux l’interrompirent, c’est sur eux qu’il passa ses nerfs. Impétueux, immature et orgueilleux. La dérision n’était pas une chose que l’on appréciait sur Asgard, tout comme les interruptions dans les affaires privées et son honneur lui disait de rétorquer. Même contre des midgardiens. Et son aveuglement ne lui permit pas de prendre le dessus. Le dieu du tonnerre ne s’attendit pas à une telle résistance de la part de simples mortels, et c’est les fesses au sol et l’esprit un peu brumeux du choc, qu’il se calma finalement.