Douze ans. L'enfant n'avait que douze ans. Je n'étais qu'un "bébé". Même si, en ces années là, nous étions déjà considérés comme des adultes... Sauf que j'étais passée de l'enfant au monstre de foire. Celle qui allait apporter le malheur et le désespoir sur sa ville. Sur toutes les villes qu'elle traversait. J'étais l'enfant bleu. L'enfant du Diable. Les cailloux volaient en ma direction...


Des hurlements pour me faire fuir. Ou des mains qui m'attrapaient pour me tirer. Pour me faire subir le même sort qu'aux sorcières.


Les larmes avaient coulées, si longtemps, au début. Alors que je changeais d'apparence sans réellement le maîtriser. Qu'une part de moi ne se modifiait pas ou que la "transformation" ne tenait pas... Que les gens se remettaient à m'insulter, à jurer et à me maudire. A vouloir ma perte... Puis l'enfant était réellement devenue une adulte. Elle s'était endurcie... Trop frappée, trop violentée, trop trainée dans la boue... Je n'étais pas "née" Mystique... J'étais née avec un nom perdu depuis si longtemps, un enfant "normal"... Que l'Homme méprisa en voyant sa peau bleue, qu'il posa la première pierre, symbole du début de "Mystique"...


Détective privée. Un de mes nombreux métiers... Grâce à lui, j'ai rencontré Irène. Irène Adler. Elle m'avait contactée. Elle avait besoin d'un coup de main avec ses journaux. Des journaux qu'elle avait écrit alors qu'elle n'avait que douze ans. Des visions. Elle ne les comprenait pas et elle m'avait donc "engagée" pour ça... Même si je continuais de travailler sur le côté, que mon amitié envers cette femme devenait un amour... On s'est mises à voyager. Avant de se séparer. D'écarter nos chemins.

J'ai vécu beaucoup de choses. J'ai été bien des personnes : Leni Zauber, espionne allemande mais agent-double pour les Etats-Unis, lors de la Guerre Froide. Une femme qui eut des rapports avec Dents-de-sabre. Puis je me suis faite passée pour morte. Vint ensuite l'identité de la femme du riche baron : Christian Wagner. J'ai été sa femme, son épouse. Je vivais une vie calme dans la peau d'une autre... Ce fut à ce moment-là que j'ai rencontré Azazel. Que j'ai eu une aventure avec cet homme. Aventure qui découla sur la naissance de Kurt Wagner. Dit Diablo. A sa naissance, les femmes s'occupant de moi, furent horrifiées et apeurées de voir l'enfant à cette fourrure bleue, aux doigts ne se comptant que par trois et avec cette minuscule queue de démon... Ce n'était qu'un petit être fragile. Petit. Innocent. Mais un mutant. Comme moi. Moi qui perdais ma fausse apparence, à cause d'une connerie de distraction, épuisée par l'accouchement ! La peur se lisait sur le visage de ces femmes. J'ai fui. Loin. Très loin. Très vite ! Avec le garçon entre mes bras. Sauf que j'étais pourchassée, poursuivie et alors, j'ai compris une chose : soit j'allais mourir avec cet enfant. Soit l'enfant mourait et, moi, je vivais...


Je l'ai jeté, balancé au-dessus d'une falaise. Je n'avais même pas réfléchi deux secondes, c'était moi ou lui... Et depuis mes douze ans, j'avais très bien compris une chose : toujours miser sur soi. Malheureusement, il fallait aussi compter, par moment, sur l'idiote de bonté des autres. Affamée par ma fuite, assoiffée, épuisée, j'ai rencontré Dents-de-sabre. Je lui ai demandé de me nourrir, m'abreuver... Avec sa nourriture, il pouvait bien faire ça. Si les mutants ne s'entraidaient pas, que faire ? Il m'a montré ce qui pouvait me rassasier et m'a demandé des faveurs en échange. Faveurs sexuelles... Et j'ai accepté. On a fui ensemble jusqu'au Canada et je me suis vengée de cet homme qui avait usé de mes faiblesses : je l'ai livré aux militaires. En fuyant. En le laissant aux mains des autorités. Comment se venger de cet homme qui, en plus, me fit engendrer un futur Anti-Mutant !

Puis, je me suis posée ailleurs. Avec Irène. Je l'ai retrouvée et nous nous sommes installées ensemble. Ce fut à cette période que j'ai croisé le chemin d'une autre mutante. Malicia. Armée, seule. Elle était jeune, je ne savais pas qu'elle était "comme moi". Comme Irène et moi. C'était juste une enfant, perdue... Que j'ai recueillie, que j'ai ramené chez moi et qu'Irène m'a poussée à la garder chez nous à l'adopter... ce que nous avons fait. On a gardé cette enfant, tout en étant les mutantes combattant pour nous et pour les Mutants. J'étais, sous ma "couverture" de Raven Darkhölme, une secrétaire pour le DARPA - Département  de Recherche du Ministère de la Défense -, pour savoir tout ce qu'ils pouvaient manigancer contre les mutants. Le quotidien était bien ficelé. Irène - en tant que Destinée - et moi, avions deux vies. Trop bien, sûrement ! Parce qu'un jour, en rentrant chez nous, un cri. Un hurlement à me glacer le sang. Provenant tout droit de la chambre de Malicia ! Le pire m'avait traversé l'esprit : nous étions repérées. Destinée et Mystique avaient été retrouvées et ils osaient s'attaquer à notre fille ! Seule, Irène étant de sortie, je suis montée, je me suis hâtée. Et si des putains d'anti-mutants étaient en train de faire quoi que ce soit à Malicia, je les tuerai !

Mais il n'en était rien. Il y avait bien un corps mais ce n'était pas celui de Mal'. C'était celui de... De... Euh... Jamais retenu son nom, à celui-là. Comment avait-il fini ainsi, ça, c'était une question à laquelle je répondrai après. Parce qu'avant, c'était de ma fille qu'il fallait que je m'occupe ! Ses sanglots étaient puissants et je pouvais moyennement comprendre. Il était figé, j'aurai presque dit mort... Mais je me fichais de lui, la preuve : son nom devait déjà m'être inconnu en ce temps-là. Tout ce qui m'importait, c'était Malicia. En pleurs. Angoissée. Effrayée ! J'ai voulu aller la réconforter, la prendre dans mes bras - comme quoi, j'avais réellement un instinct maternel, n'allez pas le dire au pauvre Kurt -...


J'ai souffert. D'une douleur inconnue, malgré les tortures, malgré les coups, malgré toutes les blessures qui avaient pu souillées mon corps ! Corps qui passait de celui "normal", celui qui était connu de ma fille... Pour l'immondice à la peau bleue. Ce que j'étais "réellement"... Comment ? Pourquoi ? D'où ? Etait-ce à cause de la douleur ?! Mais le pire, c'était de me retrouver face à ce que j'étais "avant". Cette identité humaine, cette peau blanche... Que se passait-il ? Pourquoi ? En quoi... A quel moment...? Une mutante ? Serait-elle une mutante ? Il n'y avait que ça, comme explication... il avait fallu la rattraper - en faisant bien attention de ne pas sortir avec cette peau à la couleur des saphirs -. L'attraper. Lui expliquer ce que j'étais. Ce qu'était Irène. Ce que nous étions. Pour ensuite, travailler son don. Don si... Mortel. Intéressant. Un avantage pour la Confrérie que l'on rejoignait, Destinée et moi. Malicia qui ne souhaitait pas nous rallier... Irène me disait d'être patiente, que ça "irait". Sauf qu'elle voyait le futur. Moi, non. Je n'avais que ses journaux, que j'avais interprété il y a si longtemps. Mais certains étaient encore flous. Trop... Et il n'y avait pas tant que ça sur l'enfant que nous avions adopté... Non, il fallait que j'intervienne. Que j'y mette mon grain de sel. Malgré les objections d'Irène. En brisant Malicia. En usant de mon propre pouvoir pour lui briser ses espoirs sur l'Institut Xavier. Parce que les idéaux de la Confrérie étaient plus grands, plus beaux... Bien mieux que cette école pour mutants ! J'ai joué avec son esprit, comme je l'ai souvent fait. Sur des inconnus. Sur des équipiers d'un soir. Cette ligne, je l'avais de nouveau passée. J'avais osé la franchir avec celle que j'avais pourtant recueillie. Prise sous mon aile.


Mais tout s'enchaîna... Mal. Une confrontation entre les X-Men et la Confrérie, avec Malicia et Destinée à mes côtés. Un combat qui tourna mal, où la fuite n'était que notre seule issue. En ordonnant de fuir à ma fille, j'avais croisé son regard. Différent. Compris que quelque chose se passait et sa main sur ma peau. Je savais ce qu'elle voulait, ce qu'elle voyait ! Je souffrais et je tentais de me défaire mais elle gardait sa prise, sans flancher, sans changer de regard. Non. Elle était... Stoïque. Au moment de me relâcher, je n'avais pas le temps de dire quoi que ce soit. Même pas un "attends" parce que : comment expliquer cela ? Comment lui dire ?! Comment lui faire comprendre que ça avait été la seule solution pour qu'elle me suive ? Pour qu'elle adhère à cette cause bien plus juste ?! Non, je n'avais pas le droit de me défendre. Le méritais-je seulement ? Et, ayant "pris" les pouvoirs de l'homme aux yeux lasers - oui, Cyclope -, pour m'attaquer. Sûrement que me tuer était envisageable ! Peut-être qu'à ce moment-là, j'ai regretté. Peut-être me suis-je dit que j'avais été trop loin. Aucune idée... Tout ce que je savais, c'était que j'avais fui. Que ce jour avait été la séparation entre elle et moi...

Puis je perdais Destinée. Vu la montée de la peur envers les mutants, des mouvements contre nous, la Confrérie s'est alliée un temps au gouvernement en échange d'un pardon. On s'est alliés à eux. On a combattu pour nous. On a sauvé une ancienne cible. Sur l'île, j'ordonnais à Forge de veiller sur Destinée. De veiller sur elle, elle, ma bien-aimée qui semblait de moins en moins bien. Je l'avais quittée, en lui promettant de la revoir après la bataille. Car c'était normal. Car j'en étais sûre... Sauf que je finissais par avoir Forge à mes côtés - renvoyé par Destinée, paraît-il -, qu'il m'aidait pour combattre alors que j'avais vu la Mort de près. Car j'avais cette sensation... Cette drôle de sensation... Ce coeur qui se brisait... Ce coeur qui se serrait... Et j'ai très vite compris pourquoi : Destinée était morte. Elle était là. Assassinée par l'un des enfants de Charles Xavier. Par Légion. J'ai été brisée en voyant ce corps. Ce corps mort. J'étais... Détruite. Je me retrouvais seule. Seule... Sans personne... Abandonnée... Blessée au plus profond de mon être... j'ai hurlé, hurlé de douleur alors que je tenais son corps dans mes bras ! J'ai pleuré, comme jamais ! Et j'ai juré vengeance. Juré de tuer Forge ! De venger Destinée ! Si cet idiot était resté à ses côtés, elle serait encore en vie ! Tant pis, si moi, je mourrais !

Puis j'ai finalement dû être son équipière. J'ai travaillé pour Xavier, j'ai tenté de le tuer... Un quotidien, en somme, pour l'être que j'étais. Je combattais. Seule. J'étais recherchée dans tellement de pays que l'anonymat n'existait pas, ma seule chance, c'était le fait de pouvoir changer de forme, de ne jamais garder ce corps bleu... J'ai tenté de combattre la déportation. De ne pas aller là bas. Dans ces terres inconnues. J'avais essayé de sortir de cette malédiction qui semblait être à l'oeuvre...


Je fuyais dans un pays désertique, je cherchais un moyen de ne pas être emportée. Connaître d'autres personnes ayant pu entendre parler de ces choses... Ils avaient osé attraper Mal' ! Puis la lumière m'avait attrapée. Happée. Et j'avais fini, ici. A Burning Dust... La survie avant tout, j'avais pris une nouvelle apparence. Une forme humaine inconnue de mes anciens alliés et aussi de mes ennemis. J'étais ici sans être connue... Avec comme seul but : rentrer chez moi et, en attendant, péter les dents de n'importe quel idiot osant se proclamer anti-mutant !